Zeynep Arikanli*
Cet article est finalisé dans l’immédiat de l’attentat d’Istanbul du 12 janvier 2016 dont le bilan officiel fait état d’au moins 10 morts et de 15 blessés. Cet attentat dont l’auteur est – de nouveau – l’État islamique (Daech) a touché un pays qui est déjà déchiré par la contestation kurde, ainsi que par une polarisation sociale[1] qui s’aggrave de jour en jour, et sa vulnérabilisé en raison de ses relations complexes avec Daech. Le bilan, sur l’année 2015, est pénible : alors qu’un attentat ciblant un meeting du Parti démocratique des Peuples (HDP) a causé 3 morts à Diyarbakir (le 3 juin 2015), le 20 juillet 2015, la Turquie a été secouée par un autre attentat qui a causé 33 morts et des centaines de blessés à Suruç (une ville et un district de Şanlıurfa à proximité de la frontière avec la Syrie). Les victimes étaient des jeunes de sensibilité de gauche qui se préparaient à faire une visite de solidarité à Kobané, au Kurdistan syrien, ville qui a été le théâtre des conflits violents d’octobre 2014 à janvier 2015 entre les forces kurdes et Daech. Trois mois plus tard, un nouvel attentat qui a visé un meeting de paix à Ankara, la capitale de la Turquie, a causé 102 morts et des centaines de blessés. Ce massacre a été le point culminant d’un processus d’escalade de la violence en Turquie à la suite du massacre de Suruç. Cette escalade est, en quelque sorte, la confirmation des bilans politiques et diplomatiques turcs des deux dernières années : l’élaboration de la politique étrangère demeure handicapée par deux crises majeures dans la région (à savoir les crises syrienne et irakienne). Ce handicap qui fragilise les relations à la fois avec les voisins et les pays occidentaux a contribué, à la fin de 2015, « à la détérioration de ses relations avec la Russie notamment, sans pour autant permettre le rétablissement de rapports confiants avec ses alliés occidentaux »[2]. Dans ce sens, on peut confirmer que la Turquie a « récupéré » l’image que Jean-François Bayart avait décrite en 1981 comme suit : « Par opposition aux “nouveaux centres de pouvoir” la Turquie constitue un exemple intéressant de cas avorté de montée en puissance et elle paraît être sur la pente descendante du système international »[3]. Avant de proposer une analyse de ce retour que nous considérons comme un choix des décideurs politiques turcs, procédons à un état des lieux de ces dernières années au cours desquelles la politique étrangère de la Turquie s’est transformée en une politique « étrange », alors que la Turquie elle-même s’est transformée d’un meneur de jeu (playmaker) en une source de problèmes et de tensions dans la région. Nous verrons que la Turquie d’Erdoğan n’a pas « perdu les pédales[4] », mais elle a fait des choix stratégiques qui sont manifestement mal calculés et souvent mal joués. Or, il y a juste cinq ans le pays traversait des mutations d’une ampleur inouïe.
En 2011, Jean Marcou, Professeur en Sciences politiques à Grenoble, notait qu’« au cours de la décennie qui a suivi l’an 2000, la politique étrangère de la Turquie a connu de profondes mutations »[5]. Alors que l’arrivée au pouvoir en 2002 de l’AKP n’a pas changé la donne diplomatique immédiatement, « il a fallu attendre la seconde victoire consécutive de ce parti en 2007, et en 2009 l’accession au ministère des Affaires étrangères d’Ahmet Davutoğlu [l’actuel premier ministre] »[6]. Dès son arrivée, Davutoğlu s’est lancé dans l’application d’un nouveau principe devenu sa devise : « zéro problème avec nos voisins ». La mise en application de ce principe a été l’une des premières illustrations d’une approche, ou encore, d’une volonté que Davutoğlu avait exprimée lors de son discours d’ouverture à la 3ème Conférence des Ambassadeurs turcs en janvier 2011. Ahmet Davutoğlu y avait expliqué que la Turquie était non pas un État déchiré, mais bien une « colle qui assemble et rapproche des cultures différentes »[7]. Selon lui, la Turquie, qui était « située au carrefour de plusieurs aires culturelles perturbées par de nombreux conflits, devait mettre à profit cette géographie complexe, mais riche de contacts et de potentialités pour se rendre indispensable au bon fonctionnement des relations »[8] régionales et internationales. Les cinq ans qui se sont écoulés depuis janvier 2011 n’ont fait, pourtant, que démentir ce tableau optimiste. Alors que « l’année 2013 avait largement révélé les déboires des fleurons de la nouvelle politique étrangère turque […], l’année 2014 aura montré que cet échec était plus grave que ce que l’on avait pu prévoir ». Jean Marcou constate comme suit :
« Au cours de l’année écoulée, la guerre civile syrienne a eu des effets encore plus dévastateurs pour la Turquie que ceux des deux années précédentes. Elle s’est accompagnée d’une déstabilisation inattendue de l’Irak, les deux crises se confortant pour complexifier la question kurde et rendre plus incertains les efforts engagés par Ankara pour essayer de mettre un terme à la guérilla du PKK qui sévit depuis 1984 dans les départements du Sud-Est du pays »[9].
Avec le durcissement de la guerre civile en Syrie, accompagnée de la consolidation du régime de Damas secondé par la Russie, la Turquie s’est trouvée dans une position encore plus délicate qu’elle n’arrive toujours pas à gérer. À partir de 2014 notamment, « l’instabilité du voisinage de la Turquie a contribué à raviver la question kurde, en favorisant la renaissance d’une situation de guérilla permanente et l’apparition de zones d’instabilité dangereuses dans le Sud-Est du pays »[10]. Ankara a du mal à s’adapter effectivement à l’évolution des équilibres sur le terrain syrien ce qui a favorisé le renforcement du Parti de l’Union démocratique (PYD) dans le Nord du pays notamment après leur victoire à Kobané alors que « Damas continuait à sécuriser ses zones d’influence avant de repartir à l’offensive »[11]. Ainsi, la Turquie a vu son plan de soutien à l’opposition modérée avorter… de nouveau. Ankara a subi un échec similaire en Irak. Rappelons : Feridun Sinirlioglu, le Ministre des Affaires étrangères du gouvernement intérimaire, avait effectué une visite à Arbil et eu des entretiens bilatéraux les 3 et 4 novembre 2015 « à l’occasion du Forum MERI 2015, organisé par l’Institut de Recherche du Moyen-Orient »[12]. Ces entretiens (effectué avec Massoud Barzani et Nechirvan Barzani, respectivement Président et Premier ministre de l’administration régional kurde du Nord de l’Irak) portaient essentiellement sur une éventuelle coopération entre les parties notamment en matière de sécurité, plus précisément, de lutte contre le PKK[13]. Un mois plus tard, la Turquie a déployé un bataillon blindé de l’armée sur un camp militaire à Bachiqua, zone située près de Mossoul[14]. Cette manœuvre unilatérale n’a pas tardé de susciter de vives protestations de la part de Bagdad qui a exigé le retrait immédiat des troupes turques. Face à la réticence d’Ankara, Bagdad a adressé une lettre de protestation au Conseil de Sécurité de l’ONU. La tension s’est soldée par le retrait des troupes de la zone concernée pour se diriger vers le Nord. Ladite manœuvre, qui laissait entendre que le déploiement était le résultat d’une entente tacite conclue entre Sinirlioglu et les Barzani lors de la visite d’Erbil, a donc manifestement avorté.
Alors que les manœuvres diplomatiques et stratégiques d’Ankara ne cessent d’être perturbées, ses choix sont rigoureusement mis en cause à l’intérieur, aussi. À ce titre, le Parti populaire républicain (CHP), le principal parti d’opposition, a condamné la décision gouvernementale portant sur le déploiement des troupes au Qatar. En effet, il s’agissait d’une décision prise en vertu de l’accord conclu en mars 2015 (un accord portant sur la coopération militaire) entre la Turquie et le Qatar. Avec cet accord, les parties s’étaient mis d’accord sur le déploiement mutuel de troupes, la formation des militaires et l’échange des technologies. Cet accord est considéré comme une nouvelle phase des relations entre les deux pays soucieux d’assurer leur sécurité dans une région plongée dans un cercle vicieux de violence. Or, le timing de la décision est critique, puisqu’elle est adoptée dans une conjoncture de crise diplomatique entre l’Arabie Saoudite et l’Iran, qui a éclaté après l’exécution du dignitaire chiite Nimr Al-Nimr[15]. Cette crise prend de plus en plus une tournure régionale principalement sur deux plans : en premier lieu, elle est susceptible d’approfondir la fracture sunnite-chiite dans la région ; en second lieu elle touche la crise syrienne dont Téhéran et Riyad constituent les deux parties extérieures opposées. Alors que Téhéran, secondée par la Russie et la Chine, soutient le régime de Damas, Riyad est accusé de soutenir les terroristes extrémistes en Syrie – sans parler de sa campagne aérienne menée au Yémen. Dans une telle conjoncture, la position de la Turquie s’avère être de plus en plus problématique : loin d’apaiser les tensions et d’être un meneur de jeu (playmaker), elle semble se transformer en une source de problèmes et de tensions.
Pourquoi, alors, insister sur des choix qui ne cessent d’échouer ? Cela reste une question difficile à répondre. Il est quand même possible de distinguer deux raisons principales : la question kurde et les relations complexes avec Daech. La fragilisation de la position turque face à ces deux défis majeurs dans la région est strictement liée à la crise syrienne.
Force est de rappeler qu’en 2011 déjà, la Turquie et la Syrie avaient forgé une nouvelle relation de proximité, après de longues années de relations tendues. Par cette relation avec la Syrie, « la Turquie entendait apporter son aide à Bachar al-Assad dans la gestion des prémices de contestations qui se sont cristallisées au printemps 2011 »[16]. La manœuvre d’Ankara peut être considérée comme un effort pour combler le retard quant à réagir proprement au Printemps arabe. En revanche, ce lien de confiance s’est vite avéré précaire :
« Le lien de confiance qui unit les deux pays à l’époque explique la vive déception d’Ankara face à la réaction du Président syrien qui écrase la révolte, tout en promettant des réformes à son allié turc. Soucieuse des répercussions sur sa propre sécurité, et notamment inquiète quant à un éventuel regain du sécessionnisme kurde, la Turquie envoie alors, à de multiples reprises, des représentants spéciaux à Damas, pour engager son allié dans la voie des réformes. Le gouvernement montre un relatif désarroi, préoccupé par l’hypothèse d’un changement de régime qui viendrait compromettre les équilibres régionaux, mais désireux d’apparaître comme un acteur qui soutient et promeut le droit des peuples. Cela donne lieu à une attitude pour le moins schizophrène : la Turquie soutenant son allié damascène mais accueillant début juin sur son territoire une réunion d’opposants en exil. La tenue de cette réunion en territoire turc marque la première rupture importante et ternit son image auprès de la partie de la population syrienne restée fidèle à Bachar al-Assad : l’ambassade turc à Damas voit alors, le 12 juin, des manifestants dénoncer ce qu’ils qualifient d’ingérence turque dans les affaires intérieures syriennes et des bus turcs sont les cibles de jets de pierres à plusieurs reprises »[17].
Le durcissement de ton de deux parties a débouché sur un deuxième moment de rupture qui s’est cristallisé lors de la rencontre, le 9 août en Syrie, entre al-Assad et Ahmet Davutoglu, alors le ministre des affaires étrangères. Parvenue à aucun accord tangible, cette rencontre est suivie de la dégradation progressive des relations turco-syriennes : suite à la qualification de la situation syrienne « d’affaire intérieure de la Turquie », Damas « a mis ouvertement en garde Ankara contre son ingérence »[18]. Alors que le 21 septembre les relations sont officiellement rompues, la Turquie a accueilli, à Istanbul, une réunion de factions de l’opposition coalisées au sein du Conseil national syrien (CNS), rassemblant différentes composantes de l’opposition. La rupture est devenue encore plus importante quand un avion turc F-4 a été abattu au dessus de la Méditerranée. Cette tension est relativement bien gérée sans se transformer en un conflit qui pourrait facilement gagner la région dans son ensemble. De 2011 à 2015, l’état de crise qui sévit en Turquie et dans la région ne cesse de s’aggraver : la question épineuse des réfugiés syriens, l’attentat de Reyhanli du 11 mai 2013, l’attaque chimique du 21 août 2013, la « crise des camions » de janvier 2014[19], ont été les tournants critiques d’une démarche qui devient extrêmement dangereuse.
Dans cette conjoncture, la question kurde peut être considérée comme une variable dépendante de l’équation de la crise syrienne. De ce point de vue, elle demeure l’un des paramètres structurants de l’approche turque de cette crise. Comme Didier Billion et Salomé Lamolinerie le soulignent, « au sein de la guerre civile en Syrie s’est rapidement cristallisée la question kurde en Syrie, dans la mesure où certaines factions kurdes ont immédiatement pris part au mouvement de contestation »[20]. Dès le début de la crise, Ankara, qui mise effectivement pour le leadership régional en créant et/ou renforçant un axe sunnite, craint, en même temps, que l’instabilité ne favorise les velléités autonomistes/indépendantistes et ne débouche sur la création d’un Kurdistan syrien. L’approche d’Erdogan sur Kobané et sur Rojova est issue d’une telle crainte et elle n’est pas du tout vaine. C’est vrai que la crise syrienne « a permis un considérable essor du mouvement nationaliste kurde en Syrie en lui permettant de se structurer »[21]. Le mouvement s’est encore renforcé, notamment après la victoire de Kobané à la suite de laquelle les Kurdes ont été considérés comme les principaux combattants contre Daech notamment en Occident, et particulièrement aux États-Unis. À cette équation épineuse s’ajoute les Kurdes d’Irak, qui sont des partenaires fidèles de la Turquie, mais qui sont néanmoins proches des Kurdes de Syrie et de Turquie. Même si la Turquie arrive à entretenir de bonnes relations avec les Kurdes irakiens (notamment avec le clan Barzani), les instabilités qui secouent l’Irak et l’escalade de la violence en Turquie sont susceptibles d’ébranler ces relations déjà précaires. En tout état de causes, la Turquie semble vouloir empêcher à tout prix la formation d’un Kurdistan à ses frontières syriennes. Cet effort, à son tour, rend la dimension confessionnelle encore plus délicate. Certes, il ne faut pas tomber dans la vision qui serait trop limitée et schématique de voir dans cette dimension un affrontement entre chiites et sunnites. En revanche, il faut admettre que c’est un autre paramètre structurant de la crise actuelle[22]. Du point de vue de la Turquie, il semble que le jeu et l’enjeu sont d’établir un axe sunnite dans la région qui lui permettrait d’endiguer la zone chiite et de détourner le risque de formation d’un Kurdistan indépendant ou au moins autonome.
Avec tous ces éléments en main, il est possible d’avancer que la Turquie est sur une pente descendante au sein du système international. Cette tendance résulte en effet, d’un triple processus qui a poussé la Turquie à réviser ses alliances :
1) le vote « Non » de la Chypre du Sud face au vote « Oui » du Nord concernant la réunification de l’île[23], et l’adhésion de Chypre, le 1er mai 2004, à l’Union européenne malgré une division sociétale et politique non réglée. Cette décision constitue un point tournant dans les relations entre la Turquie et l’Union européenne depuis lequel la première s’est éloignée graduellement de la perspective de faire partie de l’Europe pour s’orienter vers d’autres alliances notamment au Proche-Orient ;
2) la perturbation de la nouvelle orientation de la politique étrangère turque suite à l’ « Affaire Mavi Marmara »[24]. Cette dernière s’est soldée non seulement par la détérioration des relations entre la Turquie et Israël, mais aussi par la « proche-orientalisation » de la Turquie du point de vue du choix de ses alliés. Le coup d’État en Égypte qui a renversé les Frères musulmans qui s’étaient emparés du pouvoir lors du Printemps arabe constitue un autre point tournant dans la politique étrangère de la Turquie. Cette dernière n’a guère reconnu le gouvernement Sissi, ce qui a fragilisé sa position sur la scène internationale ;
3) le référendum turc[25] de 2010 qui est présenté comme une lutte entre les pro-militaires (le camp du Non) et les forces démocratiques (le camp Oui, mais surtout celui du Yetmez ama Evet – « C’est insuffisant mais c’est oui ! »). Cette division illusoire et la victoire emportée par le camp du Oui, a contribué à une division sociétale inouïe qui a permis à l’AKP, mais surtout à Erdogan de marginaliser d’une manière homogénéisant tout ce qui s’oppose au parti et à ses politiques. Au fur et à mesure, cette marginalisation s’est transformée en criminalisation, voire en liquidation des opposants, notamment après la Révolte de Gezi[26]. Ce triple processus se traduit donc par une rupture généralisée avec les lignes politiques, diplomatiques et sociales qui limitaient auparavant le champ d’action des dirigeants.
À cette rupture s’ajoute une politique étrangère qui a oscillé « entre deux pôles de la stratégie de maximisation des ressources nationales et de la stratégie à but hégémonique »[27]. Cette situation qui est susceptible de produire des conséquences encore plus graves, fait de la Turquie des premières décennies 2000 un conglomérat socio-politique improbable : un mélange de la Corée du Nord, de l’Arabie saoudite et du Pakistan (notamment dans le sens où ce dernier a opté pour une stratégie d’aide aux groupes djihadistes pour affaiblir l’Afghanistan) sur le plan politique et diplomatique ; une société de plus en plus polarisée ; avec une élite bourgeoise qui rappelle celle austro-hongroise de la fin des années 1800 et du début des années 1900, qui, n’ayant su parvenir ni au compromis avec, ni à la liquidation de l’aristocratie (essentiellement foncière, pour la Turquie), a fini par l’imiter (en termes de codes de conduite et d’état d’esprit) et par s’associer à l’État, et une gauche amputée et éclectique qui n’arrive pas à se renouveler et ainsi à forger un projet démocratique fondé sur des libertés, englobant l’ensemble de la société. Cet état de choses fait de toute alliance établie par et avec la Turquie un engagement précaire et fragile. Ainsi, la Turquie – qui, en effet, dépend, de plus en plus, du soutien de l’OTAN – se situe plutôt sur une ligne de fracture qu’un axe d’alliance dans sa région et dans le monde.
Notes:
* Dr., chargée de recherches et d’enseignement au Département de Relations Internationales de l’Université Galatasaray, Istanbul. E-mail : zeynep.arikanli@gmail.com.
[1] Le dernier exemple de cette polarisation est une pétition des académiciens. Près de 1200 personnes, unies sous « l’Initiative des universitaires pour la paix », ont signé lundi 11 janvier 2016 une pétition intitulée. « Nous ne serons pas associés à ce crime ». Le texte réclame la fin de l’intervention des forces de sécurité turques contre les partisans du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) dans le Sud-Est à majorité kurde du pays. La dénonciation rapide et sévère du Président de la République, Recep Tayyip Erdoğan, a été suivie par une contre campagne visant à discréditer les signataires. Les Recteurs de plusieurs universités ont réagi au pied levé en déclarant qu’ils procéderaient à « ce qu’il convient de faire » (gereği yapılacaktır). Le 15 janvier 2016, alors que 21 universitaires ont été interpellés à l’aube à leur domicile et placés en garde à vue à Kocaeli, dans le Nord-Ouest du pays, plusieurs enquêtes sont ouvertes pour « propagande terroriste » et « insulte aux Institutions et à la République turque » notamment en Anatolie.
[2] Jean Marcou, « Le bilan 2015 de la politique étrangère de la Turquie », Observatoire de la politique turque 2016 ; disponible sur le site : http://ovipot.hypotheses.org/10769
[3] Jean-François Bayart, « La politique extérieure de la Turquie : les espérances déçues », Revue française de Science Politique, 31e année, n° 5-6, octobre-décembre 1981.
[4] Cette question est posée par l’Express face aux propos tenus par Erdogan juste quelques heures après l’attentat qui a frappé Sultanahmet, le cœur touristique d’Istanbul. « L’étrange réaction d’Erdogan », l’Express, 12 janvier 2016 ; disponible sur le site :
http://WWW.lexpress.fr/actualite/monde/europe/attentat-d-istanbul-l-etrange-reaction-d-erdogan 1752900.html
[5] Jean Marcou, « La nouvelle politique étrangère de la Turquie », Les clés du Moyen-Orient, 30 novembre 2011, disponible sur le site : http://www.lesclesdumoyenorient.com/la-nouvelle-politique-etrangere-de-la-turquie.html
[6] Ibid.
[7] Ibid. Voir aussi Ahmet Davutoğlu, le Discours d’Ouverture de la 3ème Conférence des Ambassadeurs turcs, le 4 janvier 2011.
[8] Cf. Ahmet Davutoğlu, Stratejik Derinlik. Türkiye’nin Uluslararası Konumu (Profondeur Stratégique : la position internationale de la Turquie), Küre Yayınları, Istanbul, 2009.
[9] Jean Marcou, « Le bilan 2014 de la politique étrangère turque », Questions d’Orient-Question d’Occident, 5 janvier 2015 ; sur le site : https.sites.google.com : site/questiondorient/chroniques-d-actualite/5-janvier-2015-marcou-sur-la-politique-etrangere-turque
[10] Jean Marcou, article cité, 2016 (« Le bilan 2015 »).
[11] Ibid.
[12] Communiqué de presse concernant la visite de S.E.M Feridun H. Sinirlioğlu, Ministre des Affaires étrangères de la République de Turquie à Erbil, No. 283, le 3 novembre 2015, sur le site : http://www.mfa.gov.tr/no_-283_-3-novembres-2015_-communiqué-de-presse-concernant-la-visite-de-s_e_m_-feridun-h_-sinirlioğlu_-ministre-des-affaires-étrangères-de-la-république-de-turquie-à-erbil.fr.mfa
[13] Pour un sommaire officiel voir « Feridun Sinirlioglu a achevé ses prises de contact en Irak », TRT Français, 4 novembre 2015, sur le site : http://www.trt.net.tr/francais/turquie/2015/11/04/feridun-sinirlioglu-a-achevé-ses-prises-de-contacts-en-irak-382477
[14] Allan Kaval, « L’armée turque déploie des troupes dans le nord de l’Irak », Le Monde, 7 décembre 2015, sur le site : http://www.lemonde.fr/proche-orient/article/2015/12/07/l-armee-turque-deploie-des-troupes-dans-le-nord-de-l-irak 4826202 3218.html
[15] « Ce défenseur de la minorité chiite et critique du régime a été mis à mort en même temps que 46 autres personnes condamnées dans leur grande majorité pour “terrorisme” et pour appartenance à Al-Qaïda ». Voir « La crise diplomatique entre Téhéran et Riyad continue à faire des remous », Le Monde, 10 janvier 2016, sur le site : http://www.lemonde.fr/proche-orient/article/2016/01/10/la-crise-diplomatique-entre-teheran-et-riyad-continue-de-faire-des-remous 4844701 3218.html?xtmc=arabie saoudite&xter=1
[16] Didier Billion et Salomé Lamolinerie, « La politique extérieure de la Turquie à l’épreuve de la crise syrienne », Observatoire de la Turquie et de son environnement géopolitique, IRIS, janvier 2014.
[17] Ibidem.
[18] Ibidem. Voir aussi, Laure Stephan, « Les tensions restent vives entre Ankara et Damas », Le Monde, 11 août 2011 , sur le site : http://www.lemonde.fr/proche-orient/article/2011/08/10/les-tensions-restent-vives-entre ankara-et-damas 1558094 3218.html
[19] Scandale politique et diplomatique portant sur les camions officiellement affrétés par une organisation humanitaire. Les camions sont interceptés par la gendarmerie turque près de la frontière syrienne. L’opération « a viré au scandale politique lorsque des documents officiels publiés sur internet ont affirmé que ces camions appartenaient aux services de renseignement turcs (MIT) et transportaient armes et munitions destinées aux rebelles islamistes syriens en guerre contre Bachar al-Assad. Le scandale a submergé les soupçons d’un soutien d’Ankara à Daech, une accusation toujours démentie par les autorités turques. Voir aussi, « Syrie – la Turquie livre des armes à DAECH – le journal Cumhuriyet fournit des preuves », Vive la Révolution, 4 juin 2015. URL : http://mai68.org/spip/spip.php?article8877
[20] Didier Billier et Salomé Lamolinerie, article cité, 2014.
[21] Ibidem.
[22] Ibidem.
[23] Référendum du 24 avril 2004 sur le Plan Annan ayant pour but de réunifier les deux nations chypriotes divisées suite à la partition de l’île en 1974 et de créer une république chypriote unie. Le plan, qui tire son nom du nom de l’ancien secrétaire de l’Organisation des Nations unies (ONU), Kofi Annan, a été soumis à référendum et rejeté par la partie grecque.
[24] L’abordage du navire amiral Mavi Marmara, le 31 mai 2010. Il s’agit d’un assaut israélien ciblant Mavi Marmara, navire amiral d’une flottille internationale (affrétée par une ONG turque, la Fondation d’Aide Humanitaire –IHH). À l’aube du 31 mai 2010, les commandos israéliens avaient abordé par hélicoptère et dans les eaux internationales le Mavi Marmara. La flottille avait pour but de briser le blocus israélien de la bande de Gaza. Le feu ouvert par les commandos israéliens a causé la mort de neuf militants et fait plusieurs blessés. En septembre 2011, une enquête de l’ONU a abouti à la conformité au droit international du blocus maritime de Gaza, « considérant le blocus comme une “mesure de sécurité légitime”, mais dénonçant un recours à la force “excessif et déraisonnable” lors de l’assaut. Voir aussi Hélène Sallon, « Mavi-Marmara, l’affaire qui a consommé la rupture entre l’Israël et la Turquie », Le Monde, 27 mai 2014, sur le site : http://www.lemonde.fr/proche-orient/article/2014/05/27/mavi-marmara-l-affaire-qui-a-consomme-la-rupture-entre-israel-et-la-turquie_4426366_3218.html
[25] Référendum du 12 septembre 2010 sur la réforme constitutionnelle en Turquie. Il s’agit d’une réforme de la Constitution turque de 1982, issue du coup d’État du 12 septembre 1980. Alors que l’aspect anti-démocratique de cette Constitution est évident, les campagnes n’ont servi qu’à diviser l’opposition. Alors que le CHP et le MHP ont pris une position contre la réforme, le HDP a boycotté le référendum. En revanche, la mise en cause du coup d’État n’est demeurée qu’un objectif superficiel tandis que la division de l’opposition a contribué au renforcement de l’AKP. Alors que les risques éventuels des amendements proposés tels que la restriction des droits syndicaux, ainsi que la soumission du pouvoir judicaire à l’exécutif, n’ont pas été effectivement discutés par l’opinion publique, cette dernière s’est trouvée piégée dans une discussion bornée qui s’est traduite par une polarisation homogénéisante. L’AKP a misé sur cette polarisation et l’a approfondie. De même, la Commission de la Constitution fondée en vertu du résultat du référendum et qui était censée discuter les amendements n’a été que le théâtre de discussions, voire de disputes nulles et non avenues. Pour le sommaire voir : « Référendum sur la réforme constitutionnelle en Turquie », Fondation Robert Schuman. Le centre de recherches et d’études sur l’Europe, 20 août 2010, sur le site : http://www.robert-schuman.eu/fr/oee/1092-referendum-sur-la-reforme-de-la-constitution-en-turquie-12-septembre-2010. Voir aussi Laure Marchand, « Les Turcs approuvent la révision de leur constitution », Le Figaro, 12 septembre 2010, sur le site : http://www.lefigaro.fr/international/2010/09/12/01003-20100912ARTFIG00175-les-turcs-approuvent-la-revision-de-leur-constitution.php.
[26] Le mouvement protestataire de 2013 en Turquie qui a débuté le 28 mai à Istanbul par un sit-in d’une cinquantaine de riverains auxquels se sont associés rapidement des centaines de milliers de manifestants dans une grande majorité des villes et provinces en Turquie. Cette révolte, par son ampleur, la nature de ses revendications et la violence policière qu’elle a suscitée et subie est comparable à plusieurs mouvements protestataires légendaires tels que le Printemps arabe, le Mouvement Occupy, le Mouvement des Indignés, etc.
[27] Jean-François Bayart, article cité, 1981.