Avant-propos

Mustapha Mekideche, Alger, le 12 novembre 2003.

 

124En introduction à ces Actes du cycle de conférences sur l’histoire de l’Algérie contemporaine réalisé à la  Maison du Tourisme de Grenoble, de février à juin 2003, dans le cadre de l’Année de l’Algérie en France, je ne peux me contenter des remerciements que j’exprimerai plus loin.

Au début de notre réflexion commune, ce cycle de conférences devait permettre d’éclairer historiquement un colloque sur les problématiques du développement de l’Algérie dans le contexte d’insertion de son économie dans l’Union européenne. Mais sans l’avoir voulu explicitement, ce cycle a imposé une logique et une finalité plus larges au fur et à mesure qu’il se déroulait.

En effet, ce cycle de conférences mensuelles s’est construit d’abord comme une manifestation d’amitié et de solidarité entre les peuples français et algérien, amitié (re)-construite autour de la mémoire. C’est pour cela que le cycle commence le 11 février 2003 par l’histoire de la conquête coloniale introduite par Mohammed El-Korso, historien et universitaire algérien qui met en évidence la violence coloniale exercée également par les mêmes acteurs à l’encontre des forces porteuses des luttes sociales en France. Cette observation était également partagée par le professeur Hubert Desvages, agrégé d’histoire qui nous a fait l’amitié d’être discutant de cette conférence.

La deuxième conférence portait sur un regard croisé sur l’histoire de l’émigration algérienne en France. Le spécialiste et militant français Paul Muzard a rappelé la genèse et l’itinéraire de l’émigration algérienne en France et son imbrication dans les luttes politiques et sociales françaises. Le professeur Djilali Sari, de l’Université d’Alger a plus particulièrement insisté sur l’apport de la communauté algérienne résidant en France au mouvement national algérien.

La troisième intervention portait sur la guerre de libération nationale (1954 – 1962) et devait être présentée par le sociologue et historien Mahfoud Benoune que la maladie a malheureusement immobilisé à Alger. Son remplacement par Mohammed El Korso avait pour objectif de maintenir nos engagements mais également de (re)-donner la parole à un des représentants de la nouvelle génération d’historiens algériens. Sa communication a alimenté un débat qui a intéressé aussi bien les anciens émigrés de l’ex-fédération de France du FLN que les amis français solidaires du combat anticolonialiste qu’a mené le peuple algérien.

La quatrième conférence a porté sur le choix des politiques de développement après l’indépendance nationale. On ne pouvait trouver meilleur intervenant que Mohamed Liassine, premier responsable de la Société Nationale de Sidérurgie (SNS), et comme discutant le professeur Gérard de Bernis qui était en quelque sorte au cœur du modèle. Avoir affaire aux praticiens et aux acteurs théoriques d’une période est assez rare et cela méritait d’être relevé. On ne peut résumer facilement le texte dense de Liassine et l’intervention du discutant de Bernis. Il apparaît cependant que les bilans des politiques de développement mises en œuvre de 1962 à la fin de la décennie 80 sont  controversés. Cela étant, il est généralement reconnu que les résultats économiques et sociaux ont été « en deçà des ambitions affichées avec des coûts excessifs », même s’il est constaté l’émergence d’une économie algérienne moderne mais inachevée. Les deux conférenciers ont apporté des lectures explicatives qui ont des prolongements dans la difficile transition de l’économie algérienne.

Le cycle a été clôturé le 11 juin 2003 par une conférence sur « l’Algérie d’aujourd’hui, à la croisée des chemins » donnée par Smaïl Hamdani, ex-Premier ministre et ex-conseiller du président Boumédienne. La communication de Smaïl Hamdani a porté sur un essai explicatif de l’évolution récente de la société algérienne vers la démocratie et l’économie de marché, tiraillée entre identité et modernité. L’approche proposée est élaborée non seulement à travers l’analyse des dynamiques constitutionnelles mais également à travers les crises identitaires, politiques et sociales qui ont traversé la société algérienne. Cette approche a le mérite de faire ressortir, ce faisant, leurs enjeux actuels et les conditions de leur prise en charge par l’Etat national et la société. Smaïl Hamdani donne enfin — à travers son texte — quelques clés de lecture des crises et mutations algériennes à une partie de l’opinion française qui a quelquefois une image biaisée des réalités et des dynamiques de la société algérienne.

Je ne saurais terminer ce bref préambule sans remercier — en plus des conférenciers cités plus haut — nos collègues français sans la ténacité desquels ce cycle n’aurait pu avoir lieu.  Je pense d’abord au professeur Gérard de Bernis, à Rolande Borrelly, professeur à l’Université de Grenoble 3, à toute l’équipe de recherche du GRREC, notamment Alda Delforno, et aux amis universitaires algériens des deux rives, Hamid Merad-Boudia et Hamid Aït-Amara. Je ne voudrais pas oublier ceux qui nous ont apporté un soutien moral et logistique, notamment Madame Allaire responsable de l’Association Française d’Action Artistique et, du côté algérien, Monsieur le Consul d’Algérie à Grenoble, Monsieur Mohamed Raourara, Commissaire de l’Année de l’Algérie en France et Madame Wassila Chennit, chargée du département  Colloques.